Le marketing des entreprises est à la fois offensif et défensif. Dans beaucoup de cas le marketing défensif est une dimension émergente. Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à adopter une politique de qualité et des nouvelles méthodes de gestion de clientèle qui ont comme objectif de conserver et fidéliser les clients. Elles ont besoin d’évaluer les effets.
Ce modèle essaie de séparer les effets des composantes du "mix de rétention" des effets du marketing transactionnel et évaluer leur impact sur la part de marché, sur la valeur du portefeuille de clients et sur la rentabilité des investissements marketing.
Pour accueillir le changement de paradigme en marketing le modèle distingue les stratégies "offensives" proches du marketing transactionnel des stratégies "défensives" proches du marketing relationnel. Les deux stratégies agissent sur une demande hétérogène, qui est segmentée selon trois critères: l’avantage recherché par les clients, la valeur client et la fidélité.
Figure 8. Diagramme du modèle cadre
La première segmentation est particulièrement utile en marketing offensif. Elle permet aux firmes de cibler certains segments "positionnés" selon l’avantage recherché et d’adapter l’offre pour satisfaire leurs attentes.
La deuxième segmentation distingue entre "Clients clés" et "Clients non-clés" (avec un ou plusieurs états intermédiaires, donnés par une combinaison de Récence, Fréquence et Montant). Elle est fondamentale en marketing défensif.
La troisième aide à distinguer les clients qui répondent au marketing défensif (les "fidèles") de ceux sensibles au marketing offensif (les "versatiles").
Les clients "fidèles incontournables" sont sensibles uniquement aux stimuli du mix marketing de la marque qu’ils achètent, tandis que les "versatiles" sont sensibles à l'attraction exercée par toutes les marques.
Figure 9. Impact des pressions marketing sur les clients fidèles et versatiles
Vu du point de vue de l’offre d’une société, que ce soit toute l’offre ou seulement une marque (produit), le mécanisme de transition des clients sous l’impact des deux types de pressions marketing, la rétention et l’attraction, est illustré dans la figure 10.
Figure 10 - Entrées, Sorties et Transitions des clients
La politique de rétention ou le mix défensif à comme effet l’accroissement de la fidélité des clients. Parmi les clients versatiles une partie sera récupérée grâce à l’attraction exercée (par le mix offensif) et d’autres seront perdus. L’attraction va permettre en même temps de conquérir des clients des autres firmes et d’attirer des nouveaux clients. Dans chaque marché/segment il y a d’habitude un phénomène de "renouvellement" dans lequel une partie relativement stable des clients quitte le marché et est remplacée par des nouveaux. Si le marché ou le segment est stable le phénomène de renouvellement concentre toutes les entrées et sorties de clients. Par contre quand la demande sur un marché ou segment est en baisse il y a une partie des clients qui quittent le marché qui n’est pas compensée par des entrées de nouveaux clients, et quand le marché est en hausse il y a des entrées de nouveaux clients qui ne sont pas compensées par des sorties équivalentes.
La segmentation en "Clients clés" et "Clients non-clés" joue sur les réactions aux stimuli marketing.
Chaque segment a sa propre fonction de réponse aux efforts de mix marketing et une réactivité variable aux améliorations de la qualité, aux variations des switching costs et à l’intensité de la communication relationnelle.
Durant la période analysée les firmes en concurrence opposent leur marketing offensif et défensif et obtiennent des parts de marché sur chaque segment proportionnelles aux réactions déclenchées par les efforts marketing comme l’illustre la figure 11.
Figure 11. Impact du mix offensif et défensif de la firme sur les segments différents
La proportion des clients "fidèles incontournables" d'une firme dans un segment dépend de son marketing défensif uniquement. Par contre la part des clients versatiles et nouveaux qu'elle obtient, dépendent de son attractivité relative à la concurrence. Cette attractivité est fixée par les mécanismes classiques du marché.
Les parts de marché et la structure des clients déterminent les revenus des firmes.
Une formulation mathématique du modèle est donnée en Annexe C.
Une série de scénarios a été créée pour tester la sensibilité du modèle et pour évaluer l'impact sur la part de marché, la composition de la clientèle et les profits de plusieurs stratégies de mix marketing.
La réactivité au "mix de rétention" est modélisée de manière à être plus forte que la réactivité au marketing offensif. On s’appuie sur une présomption généralement acceptée qu'ils est moins coûteux de garder les clients existants que d'attirer des nouveaux.
Les courbes de réponse ont été calibrées par reproduction meta-analytique des données à partir d'articles récents concernant le retour sur la qualité (Rust, Zahorik et Keiningham, 1995 et Rust et Zahorik 1993).
Deux contextes différents: le système bancaire et le tourisme, sont utilisés pour définir les scénarios.
Les approches et mesures utilisées dans le management de la clientèle diffèrent largement entre les deux contextes, surtout ceux utilisés pour évaluer la valeur client courante (ou valeur moyenne) et la valeur cumulée pendant toute la durée de la relation d'échange (Life Time Value). L'importance de l'investissement initial pour lancer des programmes de rétention varie aussi beaucoup entre les deux contextes. Les switching costs sont d'habitude plus importants dans le système bancaire que dans le tourisme.
Il y a cinq scénarios pour l'industrie hôtelière et cinq pour l'industrie bancaire. Dans les deux industries les premiers trois scénarios sont mono-segment (clientèle homogène de clients non-clés) et les dernières deux sont multi-segment (marché hétérogène). Dans les premiers trois scénarios nous avons évalué l'effet de différents budgets marketing sur la rentabilité pendant cinq périodes. Les résultats montrent qu'il y a un budget optimum. Dans le deuxième scénario le budget est proche de l'optimum, dans le premier il n'est pas assez élevé et dans le troisième il est excessif. Dans les premiers scénarios les deux concurrents investissent principalement dans des programmes de qualité pour déterminer la rétention de la clientèle par la satisfaction. Dans les scénarios quatre et cinq le marché est hétérogène (multi-segment) et chaque concurrent utilise toutes les composantes de mix marketing, aussi bien défensives qu'offensives.
Industrie |
Hotel1 |
Hotel2 |
Hotel3 |
Hotel4 |
Hotel5 |
|||||||||||||||
Dimension du marché (numérique) |
10000000 |
10000000 |
10000000 |
10000000 |
10000000 |
|||||||||||||||
% quittant le marché |
10% |
10% |
10% |
10% |
10% |
|||||||||||||||
Taux de croissance |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
|||||||||||||||
Taux d'actualisation |
15% |
15% |
15% |
15% |
15% |
|||||||||||||||
Ratio défensif vs. offensif |
1,61 |
1,61 |
1,61 |
1,61 |
1,61 |
|||||||||||||||
Valeur moyenne |
Non clé |
470 |
470 |
470 |
470 |
470 |
||||||||||||||
client |
Moyen |
1000 |
1000 |
1000 |
1000 |
1000 |
||||||||||||||
Clé |
4000 |
4000 |
4000 |
4000 |
4000 |
|||||||||||||||
Part de |
Nous |
2,48% |
2,48% |
2,48% |
2,48% |
2,48% |
||||||||||||||
marché |
Eux |
97,52% |
97,52% |
97,52% |
97,52% |
97,52% |
||||||||||||||
Structure |
Nous |
Non clé |
1 |
1 |
1 |
0,89 |
0,89 |
|||||||||||||
segment |
Moyen |
0 |
0 |
0 |
0,08 |
0,08 |
||||||||||||||
Clé |
0 |
0 |
0 |
0,03 |
0,03 |
|||||||||||||||
Eux |
Non clé |
1 |
1 |
1 |
0,9 |
0,9 |
||||||||||||||
Moyen |
0 |
0 |
0 |
0,09 |
0,09 |
|||||||||||||||
Clé |
0 |
0 |
0 |
0,01 |
0,01 |
|||||||||||||||
Effort ($) |
Nous |
1000000 |
1400000 |
2400000 |
1400000 |
1400000 |
||||||||||||||
marketing |
Eux |
30000000 |
30000000 |
30000000 |
30000000 |
30000000 |
||||||||||||||
Structure |
Nous |
Offensif |
0 |
0 |
0 |
0,2 |
0,1 |
|||||||||||||
du Mix |
Satisfaction |
1 |
1 |
1 |
0,5 |
0,5 |
||||||||||||||
Switching costs |
0 |
0 |
0 |
0,3 |
0,4 |
|||||||||||||||
Communication |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
|||||||||||||||
Eux |
Offensif |
0 |
0 |
0 |
0,3 |
0,3 |
||||||||||||||
Satisfaction |
1 |
1 |
1 |
0,3 |
0,3 |
|||||||||||||||
Switching costs |
0 |
0 |
0 |
0,4 |
0,4 |
|||||||||||||||
Communication |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Table 1. Scénarios chaîne hôtelière: environnement du marché, part de marché, composition des segments et mix marketing
SCENARIOS |
Banque1 |
Banque2 |
Banque3 |
Banque4 |
Banque5 |
|||||||||||||||
Dimension du marché (numérique) |
200000 |
200000 |
200000 |
200000 |
200000 |
|||||||||||||||
% quittant le marché |
10% |
10% |
10% |
10% |
10% |
|||||||||||||||
Taux de croissance |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
|||||||||||||||
Taux d'actualisation |
15% |
15% |
15% |
15% |
15% |
|||||||||||||||
Ratio défensif vs. offensif |
1,61 |
1,61 |
1,61 |
1,61 |
1,61 |
|||||||||||||||
Valeur moyenne |
Non clé |
158 |
158 |
158 |
158 |
158 |
||||||||||||||
client |
Moyen |
300 |
300 |
300 |
300 |
300 |
||||||||||||||
Clé |
1500 |
1500 |
1500 |
1500 |
1500 |
|||||||||||||||
Part de |
Nous |
21,00% |
21,00% |
21,00% |
21,00% |
21,00% |
||||||||||||||
marché |
Eux |
79,00% |
79,00% |
79,00% |
79,00% |
79,00% |
||||||||||||||
Structure |
Nous |
Non clé |
1 |
1 |
1 |
0,89 |
0,89 |
|||||||||||||
segment |
Moyen |
0 |
0 |
0 |
0,08 |
0,08 |
||||||||||||||
Clé |
0 |
0 |
0 |
0,03 |
0,03 |
|||||||||||||||
Eux |
Non clé |
1 |
1 |
1 |
0,9 |
0,9 |
||||||||||||||
Moyen |
0 |
0 |
0 |
0,09 |
0,09 |
|||||||||||||||
Clé |
0 |
0 |
0 |
0,01 |
0,01 |
|||||||||||||||
Effort ($) |
Nous |
50000 |
78000 |
100000 |
78000 |
78000 |
||||||||||||||
marketing |
Eux |
118300 |
118300 |
118300 |
118300 |
118300 |
||||||||||||||
Structure |
Nous |
Offensif |
0 |
0 |
0 |
0,2 |
0,2 |
|||||||||||||
du Mix |
Satisfaction |
1 |
1 |
1 |
0,6 |
0,4 |
||||||||||||||
Switching costs |
0 |
0 |
0 |
0,2 |
0,4 |
|||||||||||||||
Communication |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
|||||||||||||||
Eux |
Offensif |
0 |
0 |
0 |
0,4 |
0,4 |
||||||||||||||
Satisfaction |
1 |
1 |
1 |
0,2 |
0,2 |
|||||||||||||||
Switching costs |
0 |
0 |
0 |
0,4 |
0,4 |
|||||||||||||||
Communication |
0 |
0 |
0 |
0 |
0 |
Table 2. Scénarios banques: environnement du marché, part de marché, composition des segments et mix marketing
Les principaux résultats donnés sont la part de marché, la composition par segments et les revenus après cinq périodes. Dans le cas du scénario Hotel4 les tableaux et graphiques suivants illustrent les résultats:
Nous |
Eux |
|
Part de marché |
0,0272807 |
0,9727193 |
Structure par segment: |
||
Clients non clé |
0,8683784 |
0,874736 |
Clients moyens |
0,1190915 |
0,1239443 |
Clients clé |
0,01253 |
0,0013197 |
Table 8 - Part de marché et composition par segment après cinq périodes (scénario Hotel4)
Comme l'effort marketing reste constant pendant plusieurs périodes, les parts de marché pour la première firme évoluent constamment comme en Figure 12. Comme beaucoup d'éléments de mix marketing défensif tells que les efforts d’amélioration de la qualité sont considérés des investissements, une série de retours sur investissements et leur valeur nette actualisée sont aussi calculés.
(a) |
(b) |
Figure 12 - Part de marché (a) et le retour sur investissement client (b) pendant cinq périodes
La perte de clients clé, due à des switching costs inférieurs, explique pourquoi la progression des parts de marché n'est pas accompagnée par des revenus généraux suffisants. Dans le scénario cinq la première firme est consciente que les clients clés sont très sensibles aux switching costs et adopte une stratégie de mix de rétention adéquate. Cette stratégie lui apporte des gains substantiels. Dans les deux industries les scénarios un, trois et quatre donnent des résultats négatifs et les scénarios deux et cinq retournent des gains.
La ressemblance entre les deux industries est seulement superficielle et vient de la manière dans laquelle l'analyse de sensibilité a été échelonnée afin de faciliter la comparaison des résultats. Il y a des grandes différences entre les deux industries qui sont encapsulés dans les modèles de réponse du marché. Des notions comme "départ / rétention" ou "re-achat / pas de re-achat" définissent les transitions en fonction de l'industrie et de la continuité de la relation client. La même distinction doit être faite entre les notions de "lost for good" et "always a share".
Le modèle utilise une triple segmentation. Il s’agit d’une segmentation par avantage recherché adaptée au marketing transactionnel et de deux segmentations comportementales, adaptées au marketing relationnel, entre clients clé et non-clé et entre clients fidèles et versatiles.
La segmentation par avantage recherché est beaucoup utilisé dans le marketing "classique" à prédominance offensive. Elle fait appel à des données d’enquête pour isoler les segments et les positionner selon leurs attentes dans l’espace perceptuel des attributs selon lesquels est jugé l’offre.
La segmentation "clients clé contre clients non-clé" avec un ou plusieurs états intermédiaires donnés par une combinaison de "Récence, Fréquence et Montant" est une approche traditionnelle en marketing relationnel et en marketing direct. Elle est très utilisée dans l'industrie.
Nous suggérons ici quelques améliorations qui sont inspirés des travaux de Morrison, Chen, Karpis et Britney (1982).
On utilise des données internes d'historique d'achat pour:
- déterminer des profils multiples de clients;
- inférer la probabilité des clients de devenir clé étant donné leurs profils;
- qualifier l'hétérogénéité de cette distribution de probabilité parmi les clients individuels
- prévoir les profils futurs des clients.
La distinction entre clients "fidèles incontournables" et "switchers potentiels" aide à séparer les clients qui répondent au "marketing défensif" de ceux qui répondent au "marketing offensif". Cette segmentation a été utilisée pour la première fois par Alfred Kuehn (1961). Les solutions économétriques initiales basées sur ses idées (voir Kuehn, McGuire et Weiss, 1966; Van Wormer et Weiss, 1970) ont donné des équations non-linéarisables (Bultez, 1996), et ont été laissées à l'oubli à cause de la difficulté d'estimation.
En 1989, Colombo et Morrison, ont repris ces concepts sans s'être inspiré directement de Kuehn mais sur des recherches parallèles dans la modélisation statistique de la migration des travailleurs (Goodman, 1961). Les derniers développements sur le sujet et les plus attractifs pour notre approche sont deux articles de Bultez (1996 et 1997) qui a construit à partir des travaux de Kuehn et de Colombo et Morrison et a proposé des solutions facilement applicables pour estimer et distinguer la clientèle "fidèle incontournable" de la clientèle "versatile" (Bultez, 1996), et pour évaluer économétriquement les effets du "marketing offensif" sur l’attractivité (Bultez, 1997). Nous utilisons cette approche différemment en mettant en avant l'estimation de l'impacte du mix défensif sur la rétention et fidélisation des clients.
Les deux méthodes de segmentation ont été appliquées comme modules séparés dans un système d'aide à la décision. Ils servent de "front end" (préambule) pour identifier la structure des clients nécessaires au modèle présenté ici.
A la différence des modèles théoriques qui cherchent des relations essentielles en stylisant et simplifiant les phénomènes, les modèles d'aide à la décision, qui décrivent la manière dans laquelle les choses fonctionnent, mettent l'accent sur le réalisme.
Même si par définition le modèle est une simplification de la réalité et si pour être utilisé par les managers il doit rester simple, flexible et compréhensible, il doit aussi pouvoir évoluer. Et cette évolution mène souvent à une complexité accrue. La conception et la programmation orientée objets offrent des solutions élégantes pour traiter la complexité des systèmes et pour mener à bien des projets de complexification.
Le modèle cadre, illustré auparavant, aide à la compréhension de la problématique étudiée mais il manque de réalisme.
Sur les marchés réels les échanges se déroulent plutôt en situation d’oligopole. Les situations de duopole sont relativement rares.
Chaque composante du mix marketing et la réponse qui lui correspond peuvent être représentés par un modèle plus complexe qu’une simple courbe en forme de S.
Dans la littérature du marketing il y a des modèles qui offrent une bonne représentation des phénomènes liés aux réactions du marché à chaque type de stimulus marketing.
Dans ce qui suit on va faire une courte présentation des modèles que nous avons choisis pour représenter les éléments du mix du modèle cadre. Ces modèles seront intégrés comme sous-modèles dans ce qu’on a appelé le modèle générique.
La complexité qu’atteindra le modèle générique suite à l’inclusion des sous-modèles, justifie la tentative de décomposition orientée objets qu’on lui appliquera à la fin de cette présentation.
Le mix offensif ne consiste pas en un seul stimulus et la réponse du marché ne se réduit pas à une simple courbe en "S". Le mix offensif concentre toute la complexité de la politique de produit, de prix, de promotion et de distribution. La réponse des clients (segments, marché) est hiérarchique, l’achat n’est pas l’effet immédiat de la pression exercé par les stimuli du mix, les sujets traversent plusieurs stades intermédiaires comme la recherche d’information qui abouti à la connaissance du produit (marque) mesuré par la notoriété. Les clients passent ensuite par des phases d’évaluation suite auxquelles ils peuvent développer une intention d’achat. Pour que cette dernière mène à un éventuel achat, les sujets doivent rencontrer une situation d’achat favorable qui a son tour dépend des habitudes d’achat et des politiques de distribution. La littérature marketing et riche en modèles du comportement du consommateur qui illustrent la complexité et la structure hiérarchique de la réponse. La figure 13 montre le schéma d’un tel modèle. Les parties du schéma encadrées (en pointillé) préfigurent la décomposition en objets que nous entreprenons à la suite pour réduire la complexité du modèle.
Figure 13 - Schéma reconstituant le modèle de réponse au mix "offensif" qui fait partie de la simulation MARKSTRAT (Laréché et Gatignon, 1992)
Le modèle MARKSTRAT est représentatif pour la vision classique du marketing, celle du "mix marketing" offensif.
L’industrie du marketing directe et typique pour le nouveau paradigme du marketing le marketing relationnel. Historiquement elle est la première à s’être construite en se basant sur une relation directe avec le client.
La récence, la fréquence et le montant (RFM) sont des critères de segmentation, largement utilisés en marketing direct et dans la vente par correspondance, qui permettent d’animer et contrôler la relation avec le client. Il y a des multiples méthodes de segmentation RFM, des plus simples basées uniquement sur l’historique d’achat aux plus complexes incluant de variables explicatives et les analyses de survie.
L’idée sur laquelle repose le modèle du marketing direct, qui est généralisable aux communications de marketing relationnel, est qu’une base de donnée ("liste maison") bien qualifiée est un investissement qui doit être géré de manière profitable.
La constitution d’une "liste maison" nécessite des investissements considérables. L’entrepreneur doit acheter des listes sur le marché des bases de données. Il s’agit de "listes louées" de clients potentiels, qui en règle générale ont des taux de réponse réduits. Cela entraîne des coûts de mailing et communication plus importants que les revenus issus des commandes passées. Ceux qui répondent aux listes louées deviennent des clients et sont inclus dans la liste maison.
Les listes maison ont des taux de réponse beaucoup plus importants que les listes louées. La réponse est stimulée par des techniques d’animation de la clientèle spécifiques au marketing direct.
Les critères de Récence, Fréquence et Montant (RFM) sont utilisés pour obtenir des segments triés selon leur taux de réponse probable. Si le client ne répond pas à une campagne de mailing sa probabilité de réponse aux campagnes prochaines est supposé en baisse et sa récence est augmentée. Quand la liste maison devient assai grande elle fournit les gains nécessaires pour compenser les pertes générées par l’acquisition et l’entretient des listes louées. L’Acquisition de listes louées, même si coûteuse, reste importante car elle permet de renouveler la liste maison, en remplaçant les segments RFM les moins rentables par des nouvelles entrées. Une illustration interactive et visuelle de ce mécanisme est donnée au chapitre suivant qui porte sur la visualisation des modèles. Elle est publie sur l'Internet à l'adresse web "http://www.eudil.univ-lille1.fr/enseignants/calciu" et repose sur une adaptation sous forme de programme en langage Javascript du modèle du marketing directe de Bitran & Mondschein (1996). C’est ce modèle que nous avons retenu pour représenter la communication relationnelle dans le modèle générique.
La relation qualité - rétention des clients définit une composante importante du mix marketing défensif. Elle est plus développée dans le modèle cadre (voir ANNEXE C) que les autres éléments du mix. Un enchaînement hiérarchique d’effets est préfiguré. Les efforts faits pour la qualité de l’offre ont un effet sur la satisfaction qui à son tour détermine la rétention des clients. Pour le modèle générique, comme pour le modèle cadre, nous avons adapté l'approche ROQ ("Return On Quality") de Rust, Zahorik et Keiningham (1995). Cette approche regarde les efforts pour accroître la qualité comme un investissement et construisent une méthodologie pour évaluer les effets intermédiaires (scores de satisfaction, taux de rétention des clients) pour analyser en final la rentabilité de cet investissement. Ce sujet est très actuel et les effets à chaque niveau de la hiérarchie sont amplement analysés dans la littérature:
Capon, Fareley et Hoenig (1990) identifient 20 travaux qui trouvent une relation entre qualité et rentabilité. La relation rétention et profits a été mise en valeur par Fornell et Wernerfelt (1987, 1988), Reichheld et Sasser (1990). Les insuccès des programmes de qualité ont mis en valeur le rôle intermédiaire de la qualité perçue et/ou de la satisfaction et aussi les intentions comportementales (un des derniers indicateurs développés pour signaler si les clients restent ou quittent l’entreprise). Voila plusieurs concepts mesurables qui s’interposent entre la qualité et la rétention pour former des modèles de réponse plus complexes et plus fins.
En intégrant les échanges en condition d’oligopole et plusieurs sous-modèles de réponse, le modèle générique devient complexe ou tout au moins compliqué. Cela justifie une décomposition dans plusieurs classes qui constituent des abstractions dans lesquelles seront encapsulés les principaux mécanismes de réponse et d’ajustement du marché. Le diagramme des classes (catégories) du modèle est présentée dans la figure 14.
La classe firme utilise plusieurs marques qui forment l'offre présentée aux segments. Les échanges peuvent s’effectuer sur le marché classique ou peuvent passer par le système d’échange direct entre la firme et les segments.
La classe "Echange directe" intègre les comportements de rétention de clientèle décrits par les sous modèles du mix défensif. Elle s'appuie sur les classes de réponse du niveau individuel, le types "lost for good" ou "always à share" en fonction du contexte. La classe "Marché classique" est définie par des valeurs et comportements spécifiques au marketing transactionnel. Elle intègre les classes de réponse au mix transactionnel, du niveau agrégé. Ces méthodes comparent les objets marques et utilisent des calculs d'attractivité pour repartir les intentions et probabilités d'achat des segments parmi les marques.
Les investissements (pour des programmes de qualité, pour les projets de R&D destinés à lancer des nouveaux produits ou modifier les marques existantes), utilisent comme abstraction la classe Programme.
La classe Economie concentre toutes les variables de l'environnement externe.
Une classe Décision est intégrée à chaque firme. Son comportement est conçu pour recevoir les inputs décisionnels soit interactivement soit à partir de scénarios prédéfinis.
Les autres classes: Force de Ventes et Distributeur, encapsulent les comportements qui assurent à chaque marque un niveau de couverture (référencement) par la distribution.
D’autres abstractions d’entité mais aussi d’action ont été prévues dans cette version (encore inachevée) du modèle.
Figure 14 - Diagramme des classes du modèle générique de marketing
Le modèle a une structure de conteneur, avec lequel les sous-modèles de réponse sont, pour l’instant, faiblement couplés. Ses réalisations auront plutôt un rôle pédagogique et d'aide à la recherche. Il représente un niveau de complexité intermédiaire, entre le modèle cadre et les modèles spécifiques (proches du problème managerial à résoudre). Son rôle dans une vision de modélisation participative serait celui d’une maquette, qui se veut réaliste et adaptable, capable de permettre des expérimentations et observations sur le comportement des managers et d'accepter les modifications qu'ils proposent.